Les clés de la transmission en zone de contraintes
Dans les zones humides herbagères normandes, le renouvellement des générations fait face aux obstacles naturels.
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Dans la Manche, près de 900 exploitations possèdent au moins une de leurs parcelles dans les 30 000 ha de zones humides herbagères que compte le Parc naturel régional des marais du Cotentin et du Bessin. Chaque hiver, les marais inondent pendant plusieurs semaines. Une contrainte saisonnière pour ce territoire laitier.
Anticiper la transmission
Avec un tiers de sa surface agricole utile en marais, Hervé Ledentu a décidé de prendre les devants pour transmettre son exploitation. « Je craignais à 65 ans de n’avoir aucun repreneur et que ma ferme ne parte à l’agrandissement, confie-t-il. J’ai pris un délai de trois ans avant ma date de départ en retraite pour anticiper ma transmission. »
Après s’être inscrit au répertoire départemental à l’installation (RDI), Hervé reçoit plusieurs candidats. Mais beaucoup sont rebutés par le peu de terres labourables qu’offre son exploitation, et ce malgré la hausse du prix du lait et sa possible valorisation en appellation d’origine protégée (AOP). « Le marais est lieu d’extensivité, rappelle Hervé aux futurs repreneurs. Il faut être conscient que l’on va travailler avec des contraintes environnementales et locales. »
Échanges de pratiques
Finalement, la transmission de sa ferme se fait en avril 2023. En attendant d’atteindre l’âge légal de son départ à la retraite, Hervé devient salarié de l’exploitation qu’il vient de céder. « C’était une facilité pour moi plutôt que de trouver un nouveau travail sur une nouvelle ferme », explique-t-il. Une configuration un peu particulière qui a également « rassuré les repreneurs » tout en constituant « un apport de main-d’œuvre et un accompagnement dans le suivi des marais et du troupeau ».
« La contrainte du marais, on s’y adapte, poursuit Hervé désormais à la retraite depuis juillet dernier. On vit de son métier, le tout c’est de s’informer, de participer aux réunions, d’échanger sur la gestion du marais. »
À quelques kilomètres, à Tribehou, Édouard Mauger de Varennes, installé depuis six ans a lui aussi pu profiter de l’expérience de son prédécesseur pour la gestion des zones de marais. « Notre cédant était présent la première année, pour nous épauler et nous aiguiller sur ce qu’il faisait sur chaque parcelle, explique-t-il. Aujourd’hui, on apprend tous les jours de nos erreurs et on progresse comme ça. »
Des voies de valorisation
Les marais, qui représentent un tiers de sa surface agricole utile (SAU), sont même, selon Édouard, une opportunité pour valoriser l’herbe et être autonome sur les récoltes de fourrage. « Je ne me vois pas avec des bêtes enfermées toute l’année », justifie-t-il alors que ses 42 hectares de marais accueillent ses génisses et ses vaches taries.
Après avoir rejoint la coopérative d’Isigny-Sainte-Mère à son installation, Édouard produit aujourd’hui 792 000 l de lait valorisés en partie en beurre et crème sous AOP. Jeanne, sa compagne, actuellement salariée de l’exploitation, doit s’installer d’ici à cet été sur la ferme.
Les deux fermes bénéficient de mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC). « Ces aides ont du sens dans ces parcelles car il n’y a pas possibilité d’aller faucher plus tôt. » Édouard a notamment engagé quelques parcelles où la fauche n’est autorisée qu’à partir du 25 juin. Par ailleurs, il bénéficie de l’indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN).
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